Wanda Swart (à gauche), Robert Bragg et Samantha Mc Carlie étudient comment la résistance aux désinfectants est transférée entre les espèces bactériennes entre les espèces bactériennes et si la résistance aux désinfectants et la résistance aux antibiotiques sont liées.Crédit : Robert R Bragg

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Des chercheurs, déconcertés par une bactérie tenace omniprésente dans leur laboratoire malgré tous leurs efforts de nettoyage, ont fini par découvrir sa stratégie de survie. La coupable, connue sous le nom de Serratia sp. Strain HRI, s'était installée à l'intérieur des bouteilles de désinfectant.

"Plus nous nettoyions, plus nous propagions la bactérie", explique Samantha Mc Carlie, doctorante à l'université de Free State, en Afrique du Sud, qui mène des recherches sur la résistance des agents pathogènes aux antibiotiques et aux désinfectants.

Mc Carlie et les chercheurs du département de microbiologie et biochimie de l'UFC mènent des études génétiques pour comprendre, au niveau moléculaire, comment Serratia sp. HRI et d'autres organismes sont capables de développer cette résistance. Des études ont montré que certaines bactéries ne sont pas seulement capables de survivre dans des environnements censés leur être hostiles, comme une bouteille de désinfectant, mais qu’elles trouvent également le moyen de métaboliser certains composés contenus dans les désinfectants et de s’en nourrir.

Élargir le champ de compréhension

Mc Carlie étudie le rôle peu étudié des ilots génomiques dans la réduction de la sensibilité aux antimicrobiens et aux désinfectants. Les îlots génomiques sont essentiellement des groupes de gènes au sein d'un génome bactérien, acquis par un processus connu sous le nom de transfert horizontal de gènes. Il s'agit de la transmission d'informations génétiques entre bactéries leur permettant de partager entre autres les outils génomiques nécessaires au développement d'une résistance aux antibiotiques.

Mme Mc Carlie étudie l'expression de quelque 90 gènes susceptibles d'être liés à une résistance accrue. Elle veut notamment savoir dans quelle mesure ils sont actifs ou non. "Ce n'est pas parce que le gène est présent qu'il joue un rôle", explique-t-elle. “ Il se peut même qu'aucun de ces gènes ne soit impliqué”.

Ces travaux sont utiles pour lutter contre la prolifération des "superbactéries", des souches de bactéries résistantes à plusieurs types d'antibiotiques. Les infections nosocomiales - ou infections acquises à l’hôpital (IAH)- sont de plus en plus fréquentes et dangereuses.

Les conséquences de l'inaction Le rapport mondial 2022 de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) suggère que les risques d'IAH en Afrique sont deux fois plus élevés que dans les pays développés, en particulier dans les unités de soins intensifs et les services de néonatalogie et de pédiatrie.

En septembre 2022, par exemple, la dernière d'une série d'épidémies de Klebsiella pneumoniae, une bactérie multirésistante, a tué au moins six des treize nouveau-nés infectés dans un hôpital de Nairobi.

Le risque de telles épidémies a été accru au cours de la campagne COVID-19, lorsqu'une multitude de désinfectants et d'assainisseurs souvent non homologués ont été mis sur le marché. Selon Robert Bragg, superviseur de Mc Carlie, c'est généralement une mauvaise utilisation de ces produits, par exemple une concentration incorrecte, qui les rend inefficaces."Si vous n'utilisez pas les produits correctement, ou s'il ne s'agit pas d'un bon produit, vous ne tuez pas les organismes", explique Robert Bragg. “Au contraire, vous leur permettez de développer une résistance ”.